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16 octobre 2020 5 16 /10 /octobre /2020 16:29

Olivier, seul à la barre, surveille le compas machinalement, plongé dans ses pensées il ne voit pas l’Est qui s’éclaircit, les étoiles qui disparaissent pour laisser la place au soleil.

 

Il fait jour quand sa décision est prise, il faut à tout prix délester le voilier de cette drogue, son père propriétaire du bateau serait mêlé à cette histoire, cela n’est pas possible ! Sans ménagements, il entre dans la cabine de Fred, le secoue et lui crie à l’oreille qu’il faut absolument se débarrasser de ce fardeau. Attends, attends Olivier, laisse-moi le temps de reprendre mes esprits, tu le veux vraiment ? Mais il n’y a de problème, moi ça m’arrange ! Je fais un café et on décide de la suite…Moguériec, oui Moguériec, nous n’allons plus à l’île de Wight, changement de cap, cap sur la Bretagne, c’est un petit port de pêche abandonné pas loin de l’île de Batz, pas loin de Roscoff, de vieilles carcasses de bateaux y pourrissent et à marée basse la mer s’en retire complètement, ça nous permettrait de mettre le voilier à la cravate, c’est-à-dire d’accrocher une amarre en tête de mât afin qu’il reste droit le long du quai quand il se pose sur le sol. Je ne connais pas plus discret comme endroit, surtout en cette saison !

 

Il va falloir naviguer trente heures de plus, on n’a déjà plus de biscuits à bord ! Comment ça va pour le reste ? On a des conserves, le reste d’une boule de Gouda et du pain sec, on n’a plus de bouteilles d’eau, il faudra boire celle des réservoirs. M’en fou, on a du pinard ! De toute façon, l’Angleterre ce n’était pas une bonne idée, le Brexit plus le covid, c’est trop, les douaniers britanniques sont très efficaces ! Le seul problème, c’est le vent du sud-ouest qui, si on le prend même au près serré, nous enverra sur le Cotentin ; le mieux c’est de continuer notre route suffisamment au large des côtes anglaises pour ne pas être repérés le plus longtemps possible pour pouvoir finalement piquer au sud droit sur Batz, ça sera donc plutôt cinquante heures de navigation. Christine, réveillée entretemps, a assisté à l’entretien, elle est désespérée, ça fait déjà deux nuits passées en mer dans une Manche secouée par les vagues que les courants contraires l’empêchent de se tenir debout sans s’accrocher, qui l’ont déjà envoyée valdinguer dans tous les coins du navire heureusement sans trop de bobos, mais la fatigue est là, ce ne sont pas ces quelques heures de sommeil qui lui permettent de tenir le coup, son corps n’est pas habitué à ces déséquilibres constants. Fred lui demande de faire l’inventaire de la nourriture à bord afin de prendre des mesures de rationnement si nécessaire. Olivier lui propose son aide, sa bien-aimée a déjà perdu la fraîcheur des premiers jours, ses yeux aussi ont perdu de leur éclat, il doit la prendre dans ses bras pour retrouver au fond de son regard la tendresse qu’elle lui voue. Il regrette de l’avoir entrainée dans cette aventure mais égoïstement, sa présence l’aide, elle lui donne plus de courage, la certitude qu’il va s’en tirer car, pour elle, ni le Brexit, ni le Covid, ni les bandits ne lui résisteront, il se battra…

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